Au-delà des images d’Epinal : les relations de voisinage dans les communes rurales périurbaines françaises
Abstract
Malgré l’ampleur des transformations du monde rural (effondrement de la population agricole et recomposition sociale de la population avec l’augmentation des mobilités, moindre différenciation des modes de vie), l’espace rural est toujours associé, dans les représentations, à un espace dans lequel les habitants sont fortement intégrés. A l’inverse, les espaces périurbains, souvent réduits à l’habitat pavillonnaire et à la dépendance automobile, apparaissent comme des lieux où les relations de voisinage sont résiduelles. Cet article propose d’aller au-delà de ces images très schématiques en explorant le cas de communes rurales récemment devenues périurbaines, Marolles-sur-Seine (1800 habitants en 2016) située en Seine-et-Marne, à près de 90 km de Paris et La Bâtie-Montgascon (1900 habitants) située à 70 km de Lyon. Dans ces deux communes, on retrouve un trait marquant à la fois du périurbain et du rural : la prédominance de maisons individuelles occupées par leurs propriétaires. Or l’habitat individuel est généralement associé au repli sur la sphère domestique, au retrait dans le confort émollient du foyer. L’enquête réalisée confirme ce que d’autres travaux ethnographiques sur les relations de voisinage dans l’habitat individuel avaient déjà montré : ces relations sont loin d’être inexistantes. L’enquête va toutefois plus loin et montre que, dans les contextes de Marolles et de La Bâtie, ces relations sont plutôt plus intenses qu’ailleurs. Les caractéristiques des trajectoires résidentielles éclairent le fort engagement dans la sociabilité locale : ceux qui sont connus une ascension en devenant notamment propriétaire d’une maison et les ménages installés depuis 10 ans et plus voisinent davantage que la moyenne. In spite of profound transformations affecting rural worlds, i.e. a decline in the number of people working in agriculture; social reconfiguration marked by increased mobility and diminished specificity of rural lifestyle, the rural space continues to be entrenched in popular representations as an environment fostering strong community ties among its denizens. In stark contrast, peri-urban locales, often narrowly defined by individual housing and car dependency, are commonly perceived as spaces where neighborly relations tend to be limited. This article endeavors to nuance these simplistic portrayals by delving into the dynamics of two rural municipalities which recently became peri-urban: Marolles-sur-Seine (1800 inhabitants), situated in Seine-et-Marne, approximately 90 km from Paris, and La Bâtie-Montgascon (1900 inhabitants), located 70 km from Lyon. These two municipalities exhibit a distinctive characteristic emblematic of both peri-urban and rural landscapes ‒ namely, the prevalence of individual houses owned by their occupiers. Such individual housing is typically associated with a retreat into the domestic sphere and the cocooning comfort of the home. Yet, our inquiry substantiates a prior ethnographic research positing that neighborhood relations are far from nonexistent within low-density residential neighborhoods. Moreover, the survey results go further, revealing that, within Marolles and La Bâtie, such relations are notably more intense than in other contexts. Residential trajectories are a key explanation of this commitment to local sociability. Notably, individuals who have experienced upward mobility, particularly through homeownership, and households which have existed in these municipalities for a decade or more exhibit higher propensity for neighbourhood relations.
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